Mathématiques et sociobiologie

Dans les années 60, on constate un travail sur le terrain des primatologues qui progresse plus vite que le travail théorique. Mais, on se retrouve face à la difficulté de sélectionner et de savoir ce qu'il faut retirer de ces observations. De plus, on déplore un flou dans la méthode de collecte de données: l'enregistrement de tout ce qui est observé, est la technique la plus utilisée.

Dans un article, J. Altmann souligne la force et les faiblesses des techniques d'échantillonage. Elle rejette l'encodage binaire des données, c'est à dire qui code l'occurrence contre la non occurrence. Par ailleurs, souligne la technique qui permet de savoir ce qu'un groupe fait plus qu'un autre ( focal animal sampling) comme plus pertinente. Cet article a eu le bénéfice de permettre une remise en cause des conclusions des recherches précédentes, mais a également permis à la primatologie de terrain des clarifications méthodologiques.

Un autre changement important a eu lieu. La primatologie va se doter d'un cadre théorique plus centré sur les stratégies individuelles de survie et de reproduction permis par l'avènement de la sociobiologie dans les années 70.

Une sociobiologie sans Wilson

L'idée que le groupe social est le résultat de stratégies individuelles destinées à maximiser les succès reproducteur fait son chemain notamment par le biais des recherches de Wrangham. Barbara Smuts sera la première à appliquer au comportement des primates une approche de type sociobiologique. Les deux chercheurs participeront parmis 40 autres, à l'élaborartion d'un ouvrage Primate Societies, qui fixe les nouveaux standards pour la recherche sur le terrain. Cependant, les auteurs nuance les conclusions de leur travail soulignant ainsi les difficultés techniques (ex: difficulté à identifier les paternités) et la complexité de la nature des sociétés et des relations sociales des primates.

Hans Kummer, expérimentateur de terrain

H. Kummer, de par ses observations, arrive à la conclusion que la proximité n'est donc pas un indice fiable de l'état des relations dans un groupe constitué. Car une fois les relations clairement établies, la proximité disparaît.

La vie en groupe entraine des désavantages (compétition alimentaire, relation de dominance, etc.), cependant on suppose qu'elle apporte d'autant plus d'avantage. Quatre hypothèses ont donc été avancées pour expliquer les groupes de primates:

  • Protection contre les prédateurs;
  • Défense en commun des ressources;
  • Efficacité dans exploitations des ressources;
  • Soins collectifs à la progéniture.

Mais aucune hypothèse ne suffit à rendre compte de tous les groupes, mais les deux premières semblent les plus probables.

La taille du groupe est limitée par l'abondance et la distribution des ressources alimentaires, mais également par des facteurs proprement sociaux (temps de toilettage social, par exemple)

Pourquoi être monogame ?

La monagamie est relativement plus répandue chez les primates que chez les autres mammifères. Selon la socio-écologie on observe cette situation dans deux cas:

  • Quand les femelles sont disséminées, stratégie de s'associer à une seule pour garantir sa paternité.
  • Pour les soins aux petits.

Primates préparant leur avenir

Stratégie du suiveur pour accéder à la reproduction sans affronter le mâle principal et risquer de graves blessures. Il s'agit de s'associer avec :

  • quelques femmes dont il aura développé des relations et de quitter le groupe;
  • avec de jeunes femelles qui n'intéressent pas le mâle principal pour reformer une « unité initiale »;
  • tuer un petit, annulant ainsi la contribution génétique et stimuler la fécondation.

L'agression a deux sexes

Présence d'agressivité aussi chez les femmes mais différente dans la forme notamment dans l'usage des signaux ritualisés dont les femelles n'en n'ont pas recours. De plus, les enjeux sont différents car pour les femelles cela n'a aucune influence sur leur succée reproducteur.

La vie sociale n'implique pas une suppression des tendances agressives, mais la mise en place de mécanismes de résolution des conflits (ex: signaux de soumission).

Remise en question de concept de dominance. Pour de Waal, il s'agit de parler de rang et de pouvoir. Le rang est stable, fait l'objet d'une reconnaissance formelle. Le pouvoir quant à lui, dépend de la situation immédiate et des alliés diponibles.

Une complexité devenue banale ?

Le paradigme sociobiologique qui domine en primatologie donne une explication fonctionnelle des comportements mesurées enterme de succée alimentaire ou reproducteur. Or cela ne concerne qu'une partie de l'explication. Il faut prendre en compte la motivation des animaux réels qui construisent les systèmes sociaux. On revient donc à une étude de la cognition chez les animaux, en s'interrogeant sur la manipulation sociale et la conscience qu'ont les animaux. Cela nous amène à une mise en garde de l'utilisation abusive du modème simien pour l'humain et inversement.

L'anthropomorphisme comme outil ?

Débat si l'animal parle (Beatrice et Allen Gardner) ou seulement apprentissage de routines interactionnelles (T.A. Sebeok)? Selon cette dernière position les animaux seraient sensibles, par conditionnement, à répondre à l'aide d'indices inconscients émis par le questionneur. C'est une polémique actuellement pas close. On critique alors le biais d'anthropomorphisme de certains chercheurs considéré comme une erreur.

Est-on anthropomaorphique par nature ?

On sait que, dans les conditions favorisant le phénomène de l'anthropomorphisme, la perception de la parenté avec l'animal joue un rôle important. L'hypothèse avancée par plusieurs auteurs pour expliquer l' anthropomorphisme suggère la conséquence d'une adaptation importante, celle de pouvoir attribuer des états mentaux (croyances et intentions)à autrui (= théorie de l'esprit). Cette attribution aux animaux est peut être une erreur innée, mais elle permet un lien émotionnel durable.

Le chien qui criait comme un orgue

L'anthropomorphisme est donc considéré comme une tentative naïve, préscientifique et erronée pour comprendre les animaux. Mais comment éviter ce biais? Historiquement, le behaviorisme s'est développé en opposition à la zoopsychologie, proposant l'interdit d'inférence et l'interdit d'empathie comme condition contre l' anthropomorphisme. Ils réduisent alors le comportement à une série de mouvements corporels et de déplacements dans l'espace. Cependant cette position est radicale, niant toute subjectivité animale, ne permettant alors une réponse à la question de la souffrance animale par exemple.

Lorenz et le jars amoureux

Lorenz conçoit une subjectivité animale, cependant il ne s'est jamais donné comme objectif de la décrire ni de l'étudier. Dans son observation totalement détendue et objective, l'empathie n'est pas considérée comme un obstacle, mais comme un outil.

Le chat poursuit-il les souris ?

Un usage purement objectif pour décrire les comportements, en terme de mouveemnts corporels et de déplacements, n'est pas sans poser des difficultés.Pour Pamela Asquith, l'usage des métaphores anthropomorphiques dans la description du mouvement animal est inévitable et recommandé. Sinon on aurait une description du comportement dépourvue de tout surcroit de significations avec des données éparses inutilisables et incompréhensibles.

Il existe deux manières de décrire des unités de comportement :

  • en terme de mouvements ou de déplacements
  • comme la conséquence d'un comportement = fonction

Comme le comportement est modelé par ses fonctions, ses conséquences, il apparaît à l'observateur comme dirigé vers un but; C'est une conséquence de l'évolution du comportement, sélectionné parce qu'il remplit certaines fonctions utiles à la survie. Et non illusion anthropomorphique mais cette intentionnalité imputée serait source d'informations importantes pour la compréhension. L'anthropomorphisme surgit lorsque l'on confond les deux formes d'intentionalité: aucune intentionnalité psychologique chez l'animal et qui s'explique en terme d'agent conscient, qui agit en fonction d'objectifs. Par contre une intentionnalité biologique: explication fonctionnelle du comportement.

Une croisade pour la pensée animale

Donald Griffin considère la notion de conscience chez les animaux; Il est contre les béhavioristes.

La tromperie comme indice

L'étude de la tromperie car révèle une intention sous jacente. Exemple: cas du pluvier qui feint une aile cassée pour éloigner le prédateur du nid. Stratégie élaborée ou simplement signal ritualisé, biologiquement fixé? Il semble plus difficile de trancher sur cette question en considérant les primates.

Ruses de primates

Exemple de la manipulation sociale chez les primates et le cas d'une femelles infidèle. Simple conditionnement? Mais comme l'homme et les primates sont des espèces proches, si on retrouve des actions analogues on peut formuler l'hypothèse d'une communauté de processus mentaux selon de Waal. L'anthrpomorphisme serait donc conçu dans ce cas comme outil de connaissance.

Vers un anthropomorphisme heuristique ?

Le recours à une méthodologie objective notamment sous l'influence du behaviorisme n'a pas résolut le problème anthropomorphique. Aujourd'hui on conçoit un anthropomorphisme acceptable avec la possibilité de parler d'amitié. On définit alors un bon et un mauvais anthropomorphisme. Le bon serait une heuristique qui utilise l'empathie et la capacité de l'esprit humain à percevoir des structures pour faire des hypothèses. Le mauvais qui utiliserait des entités mentales ( humaines) pour expliquer le comportement mais qui éloignerait le chercheur d'une meilleure connaissance de l'animal. De plus, une empathie, fondée sur de solide connaissances de l'histoire naturelle de l'espèce considérée, constitue le meilleur des remparts contre l'illusion anthropomorphique contrairement à la froide objectivité.