1. L’expression des émotions

RIRE et SOURIRE

Le livre de DARWIN (1809-1882 naturaliste/anthropologue) L’expression des émotions chez l’homme et les animaux ( 1872) peut être considéré comme le 1er ouvrage d’éthologie humaine.

DARWIN était dans l’erreur quand il comparait l’expression du sourire humain et celui du primate, en tant que signe de contentement.

Ex : HAM le chimpanzé envoyé dans l’espace par la NASA en 1961, son sourire correspondait à de la terreur

Point de vue phylogénétique

J. VAN HOOF (primatologue) chez les primates le sourire signale la crainte et la soumission et correspond à 1 rituel qui a pour fonction de calmer le dominant menaçant, chez le chimpanzé on considèrera comme 1 signal amical ou neutre dans la relation dominant dominé, le rire faisant partie d’1 jeu social. Il n’y a pas de superposition rire / sourire alors que chez l’homme rire et sourire peuvent se superposer. VAN HOOF ne parle pas de la signification, ni de ce qui provoque le rire chez l’homme.

Rire et sourire sont donc le résultat d’une évolution.

Point de vue psychanalytique

En 1940 SPITZ observe chez 1 bébé de 4 mois sourit lorsqu’1 dessin de visage de face lui est présenté et non de profil, il émet l’hypothèse que le sourire est un mécanisme de déclenchement inné et que c’est la configuration nez/front/yeux qui est le stimulus-signal déclencheur du sourire. (chez les éthologistes observés chez les poissons et les oiseaux)

J. BOWLBY affirme que le sourire fait partie d’un système biologique, il nous parle de l’attachement qui a pour fonction de maintenir à proximité la mère donc comme une protection contre les prédateurs, c’est une question de survie.

EIBL-EIBESFELDT constate en observant des enfants nés sourds et aveugles constate qu’ils possèdent la forme complète du rire et du sourire et en conclue que rire et sourire sont des expressions faciales innées, que leur apparition est due à la maturation et non à l’apprentissage

Polémiques

Les expressions faciales humaines ont une forte composante instinctive.

Le comportement humain étudié en tant que produit de l’évolution.

La contribution de l’éthologie à la compréhension du comportement humain a souvent été remise en question : on ne peut décrire le comportement humain dans les mêmes termes que pour l’animal. L’essence de l’Homme est ce qui le distingue de l’Animal (les différentes cultures, symboliques, langages)

En 1963, LORENZ a été vivement critiqué lorsqu’il avance que l’agression de l’homme ou de l’animal est bonne à quelque chose.

Pour les comportementalistes l’agression est apprise et répond à une frustration.

Les idéologistes l’accusent de vouloir justifier la violence de la société car « naturelle ».

L’indifférence

En 1972 N.TINBERGEN écrit un ouvrage sur la théorie éthologique de l’autisme, rares sont les personnes intéressées.

La mode

Quelques décennies plus tard, les explications biologiques et éthologiques de nos comportements remportent un vif succès médiatique. Récemment 2 chercheurs américains affirment que les coliques du nourrisson correspondent à une adaptation retenue par l’évolution, les nourrissons faisant ainsi peser sur leurs parents une pression émotionnelle, les bébés « sélectionnent » les parents les plus aptes à s’occuper d’une progéniture.

Toutes les observations et conclusions ne sont que des hypothèses, dans l’excès cela représente un danger pour l’éthologie humaine. La science exige des faits et des mises à l’épreuve des hypothèses.

Certaines hypothèses sur la biologie du comportement peuvent représenter un danger potentiel pour la société. Ex : LAMBROSO au 19éme siècle affirmait que des mesures faciales permettaient de reconnaître la constitution d’un criminel.

Certains hommes sont génétiquement prédisposés à violer (THORNHILL et PALMER), il serait bon de repérer ces individus et de les neutraliser afin qu’ils n’agressent plus sexuellement.

A l’inverse les éthologistes soutiennent que ce sont les circonstances qui sont déterminantes.

La biologie du comportement peut être détournée dans le but d’une politique de contrôle social.

DEMARET (psychiatre/ éthologiste) trouve qu’il est indéfendable d’envisager le déterminisme génétique sous le seul angle pathologique.

J. HUXLEY en 1964 trouvait des avantages biologiques chez les malades et porteurs sains : ils avaient une meilleure résistance aux infections lorsqu’ils se blessaient ou se brûlaient.

W. BATESON généticien au début du XXe siècle, pressenti le danger de l’eugénisme : idée de stériliser les malades mentaux graves (schizo, maniaco-dépressifs) la science doit rester prudente.

L’ ATTACHEMENT comme système biologique

De 1953 à 56 de grands chercheurs se retrouvaient à Genève en colloque sous l’égide de l’OMS. La plupart des chercheurs observaient les animaux depuis leur tendre enfance.

BOWLBY développa la théorie de l’attachement d’inspiration éthologique. Lorsqu’il y a une dislocation majeure de la relation mère-enfant dans les premiers mois de la vie, cela engendre des troubles graves de la personnalité. Concept d’empreinte : les petits de différentes espèces sont génétiquement prédisposés à préférer la mère. Bowlby émet l’hypothèse qu’il existe un système biologique analogue chez l’Homme : l’attachement qui pour lui est un besoin primaire.

M.AINSWORTH a établi le lien entre l’attachement précoce et la personnalité ultérieure, il en a retiré les théories éthologiques des troubles mentaux.

R.ZAZZO affirme que la sociabilité fait partie du biologique et confirme l’intuition de H.WALLON à savoir que l’individu est social génétiquement.

Des bébés de plus en plus précoces

L’étude du développement de l’enfant a bénéficié des apports éthologiques : les jeunes modelant leur comportement sur celui des parents.

Le bébé est considéré comme acteur dans l’interaction avec la mère :

En 1983 pour R.ZAZZO le bébé reconnait l’odeur maternelle dès 10 jours, pour H. MONTAGNER dès 3 jours. Aujourd’hui nous savons qu’il identifie la voix de sa mère dès la naissance, dès 2 semaines il distingue le visage de sa mère d’un autre.

Pour le pédiatre A.GRENIER entre 21 jours et 2 mois des programmes moteurs sont déjà prêts. Le développement du comportement n’est pas uniquement influencé par l’environnement mais structuré par l’organisme lui-même. Les mères également développent des compétences envers leur bébé : au 2ème jour après l’accouchement elles distinguent l’odeur, les pleurs de leur bébé à ceux d’un autre.

Les chercheurs parlent de danse interactionnelle où tous les sens sont impliqués. L’odorat et le goût sont étroitement liés aux émotions ex : La madeleine de Proust Pour R. HERTZ l’émotion est ne version abstraite et cognitive de l’olfaction, il en est de même pour le fonctionnel : signaler à l’organisme si quelquechose est bon ou mauvais Système de codage combinatoire. La perception d’une odeur fait remonter à la surface des souvenirs enfouis. Pour HERTZ les souvenirs liés aux odeurs ne sont pas plus exacts que ceux rappelés par les sons ou les images. Le sentiment d’exactitude est une illusion créée par l’intensité de la réponse émotionnelle.

Expressions faciales et gestualité

Dans les années 50 aux Etas unis apparaît une nouvelle discipline : la communication non verbale. E.T. HALL (anthropologue) parle de notion d’espace personnel et de distance sociale. A. SCHEFFLER (psychiatre) repère lors de séances de psychothérapie des pseudo-parades de cour et l’aident à comprendre l’organisation des interactions. Les éthologistes s’imposent dans l’étude de la communication non verbale humaine, pour eux les mimiques faciales sont la traduction d’une émotion ou d’un état intérieur.

Selon I.EIBL EIBESFELD (Darwinien) les mouvements expressifs sont innés : ex de Sabine 6 ans ½ née sourde et aveugle, possède beaucoup de schémas expressifs complets et identiques aux enfants normaux. Pour les anthropologues c’est dans une matrice culturelle que la gestualité est modelée. Le corps est régi de l’intérieur mais aussi de l’extérieur par un code de présentation de soi en public.

Les études diverses de l’homme nous montrent la difficulté d’articuler ensembles les disciplines biologiques et sociales. Les anthropologues ne sont pas toujours d’accord avec les éthologistes. Les biologistes se méfient et soutiennent que les éthologistes ne doivent pas donner d’explications suite à leurs observations. Ce n’est que fin des années 50 que les naturalistes rencontreront les éthologistes et chercheurs en sciences sociales afin de comparaître la communication humaine avec celle de l’animale

Ex : le regard fixe chez l’animal traduira une menace, alors que chez l’homme, selon son intensité cela représentera de l’attraction ou de l’hostilité. Fin des années 80, les sociologues et anthropologues travaillant sur la communication non verbale ne sont plus en contact avec les éthologistes.

Psychiatrie Darwinienne (étho-psychiatrie)

Elle émet l’hypothèse que certains symptômes résultent d’anciennes stratégies adaptatives alors que la psychiatrie traditionnelle considère les symptômes comme des pathologies, des aberrations ou des désordres.

Ex : l’archaïsme des phobies : nous sommes prédisposés à apprendre la peur de certains stimuli plutôt que d’autres, qui sont des dangers anciens : ex serpent, araignée, rat

La valeur adaptative des maladies mentales n’est pas toujours évidente

Ex : la dépression

Bon usage des analogies

Il a été reproché à la psychiatrie évolutionniste de n’être qu’une discipline en chambre. Pour Albert DEMARET l’éthologie nécessite une observation des comportements animaux et humains dans leurs milieux naturels. L’éthopsychiatre porte un double regard à la fois naturaliste et clinicien ce qui permet de mettre en évidence des symptômes négligés ex : l’altruisme alimentaire, l’hyperactivité chez les anorexiques

CONCLUSION

Selon Maeterlinck, il s’agit d’être prudent avant de tirer des conclusions applicables à l’Homme, car celui-ci a la faculté de ne pas se soumettre aux lois de la Nature…